[Lis] Everything Everything, Nicola Yoon

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Bonjour, chers lecteurs! Je vous propose aujourd’hui une nouvelle note de lecture, dédiée à un grand succès éditorial: Everything Everything, premier roman de Nicola Yoon.

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Ma maladie est aussi rare que célèbre, mais vous la connaissez sans doute sous le nom de « maladie de l’enfant-bulle ». En gros, je suis allergique au monde. Je viens d’avoir dix-huit ans, et je n’ai jamais mis un pied dehors.

Un jour, un camion de déménagement arrive. Je regarde par la fenêtre et je le vois. Le fils des nouveaux voisins est grand, mince et habillé tout en noir. Il remarque que je l’observe, et nos yeux se croisent pour la première fois.

Dans la vie, on ne peut pas tout prévoir, mais on peut prévoir certaines choses. Par exemple, je vais certainement tomber amoureuse de lui. Et ce sera certainement un désastre.

Au moment d’acheter ce livre, je sais seulement deux choses à son propos: la première est que les blogueuses littéraires en sont folles. Un indice indéniable réside dans l’omniprésence de sa jolie couverture sur mon fil Instagram des dernières semaines! La seconde est que, bien que j’ignore parfaitement le sujet dont il traite, il devient très difficile de résister à l’appel de ses sirènes. Je m’empare donc de cet ouvrage, le place immédiatement au sommet de ma pile… et le dévore en à peine trois jours.

Pourtant, à l’issue de cette lecture, mon sentiment général n’est pas aussi enthousiaste que je l’aurais cru. Ce roman ne sera pas un coup de cœur pour moi, même s’il m’a fait passer un agréable moment.

J’ai, d’une part, beaucoup apprécié sa construction et sa mise en page, qui fait alterner des chapitres de longueur traditionnelle à des formes plus brèves, comme des pensées instantanées, semées par la narratrice. Des dessins, des mémos, des transcriptions de discussions en ligne, sont également intégrés au récit et contribuent à la création d’une atmosphère particulière, d’un rythme propre, qui maintiennent l’intérêt du lecteur en éveil.

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Le style de l’auteur est, à mes yeux, l’autre qualité majeure du roman. Par son ton, d’une modernité toute poétique, Nicola Yoon offre une voix très personnelle à Maddy, dont nous nous faisons rapidement un portrait précis: jeune adulte rêveuse, elle doit sa grande imagination à son enfance passée le nez dans les livres et à la réclusion dans laquelle sa maladie la confine.

Pourtant, cette héroïne, qui avait a priori tout pour me plaire, est à l’origine de ma déception. J’ai éprouvé des difficultés à comprendre certaines de ses décisions, je l’ai trouvée inconstante, inconséquente. Si, à la réflexion, je peux attribuer ses mauvais choix à sa méconnaissance des autres et du monde, l’impression que j’ai éprouvée durant la lecture s’apparentait plutôt à un agacement croissant!

Malgré tout, j’ai réellement apprécié l’univers imaginé par l’auteur et l’originalité de sa proposition, et je dois bien admettre que je me suis retrouvée captivée par cette intrigue dont j’ai voulu connaître sans attendre le dénouement. Everything Everything est une lecture imparfaite mais qui me laissera néanmoins un joli souvenir.

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[Lis] L’homme parfait est québécois, Diane Ducret, par le Vert Lisant

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Une fois n’est pas coutume, ce soir, le Vert Lisant voit rouge… Découvrez pourquoi en lisant sa dernière critique!

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 Je m’étais replongé dans la littérature canadienne française quand ce livre est sorti de presse. Le titre promettait une lecture amusante, le quatrième de couverture assurait que la romancière revisitait le « mythe du Prince Charmant ». Prudent je consulte internet et je découvre, de suite, la critique élogieuse qu’un hebdomadaire réputé sérieux venait de publier : on y parle d’un livre spirituel, amusant, léger. Sur foi de quoi, j’achète et je commence à lire avec l’espoir de passer quelques moments agréables… Et puis, patatras, je tombe sur un florilège d’inepties rédigé dans un style où la forme ne rattrape pas le fond. Suivez-moi !!

 

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   L’héroïne de ce roman est célibataire bien qu’elle ait, à plusieurs reprises, essayé de ne plus l’être, ce qui nous vaut une panoplie d’hommes qui sont entrés dans son existence pour en sortir plus ou moins vite. La voilà qui pense entrer au couvent, et puis, quand même, non ! Enfin, heureux hasard, elle rencontre, à l’occasion d’une exposition de tableaux, le peintre en personne ; il est québécois, il est beau, charmant, séduisant. On noue une conversation, on la poursuit, plus tard dans un estaminet. Il lui avoue qu’il a des motons dans la gorge [fort peiné] car leur belle relation s’achève : il doit retourner au Québec le lendemain. Là-dessus, on se quitte, et, comme elle va prendre sa voiture, il lui demande si elle chauffe [conduit] depuis longtemps.

 

L’homme parfait s’exprime, aussi, en joual.

 

     Mais tout n’est pas perdu ! Rapidement, il lui demande de le rejoindre au Québec pour passer ensemble une semaine. Il l’attend à la porte de l’aéroport, l’habille et botte chaudement : on est en plein hiver et puis, en voiture pour découvrir sa maison, c’est-à-dire le cliché de « ma cabane au Canada » : faite en rondins avec, à l’arrière-plan : un lac, gelé certes, mais un lac quand même. On entre, elle admire, accrochée dans le hall d’entrée une tête d’orignal et découvre qu’il fait aussi froid à l’intérieur qu’à l’extérieur. On s’enveloppe de couvertures, dans le salon et puis au lit. Mais, ce sera chaste parce que (1) elle est dans une « mauvaise » semaine. Elle utilise les toilettes, mais la chasse est gelée (1), je vous passe les détails, mais elle s’en trouve terriblement gênée.  Bonne fille, elle prépare le petit déjeuner, demande à son hôte s’il a du bacon, celui-ci comprend [argent] et répond qu’il en a pas mal. Elle s’étonne parce que le frigo est vide.

    Enfin, chose promise, chose due : la promenade en traîneau. Les voilà assis, elle, son ami et le guide qui tient solidement les rênes, mais… les chiens puent et se soulagent en cours de route (1). Le peintre se saisit des rênes, ne peut éviter un cahot et la voila partie pour un vol plané qui se termine dans un tas de neige. Fini la balade romantique, d’autant plus que le Québécois doit aller chercher son fils : il est divorcé et c’est sa semaine de garde. On va faire des achats, l’enfant fait des niches dans le magasin, notre homme revient avec des paquets, demande si son fils n’a pas été tannant [insupportable], puis déclare qu’il va mettre les sacs dans la malle arrière de son char [le coffre de sa voiture]. Elle tout heureuse de voir qu’il n’y avait pas de blindé sur le parking.

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     Vient l’inévitable soirée avec les amis. Après leurs questions stupides à son sujet, viennent aussi et le repas et les libations ; le langage devient de moins en moins châtié, il emprunte de plus en plus au joual avec diverses expressions vulgaires ; notre héroïne, n’est pas en reste : « les gros mots sont, en France, comme des signes de ponctuation » (sic)

    La promenade « romantique » en traîneau s’étant mal terminée, pourquoi pas une balade en  »ski doo » [une marque de motoneige] et sans vêtements pour que ce soit plus amusant. Inévitablement, à mi-parcours, l’engin tombe en panne ; elle suggère d’appeler non pas un mécanicien (comme l’on s’y attendrait) mais un dépanneur [épicier], notre Québécois n’a pas le temps de s’étonner car sort du bois un orignal qui fait mine de charger. La motoneige consent à redémarrer et retour à la maison.

   Mais, le lendemain, il faut reconduire l’enfant chez sa mère. Comme notre peintre a de la fièvre, c’est notre héroïne qui le ramènera. Ce sera sans problème grâce au gps. La mère est avenante et plutôt gironde. Les deux femmes bavardent et, avant de se quitter, cette dernière confesse qu’elle avait peur qu’elle la trouve plate [stupide]. Sur le chemin de retour, le gps meurt, elle s’égare, échoue dans un village où elle demande son chemin à un homme. Mais c’est à « outsiplou », lui dit-il en ajoutant qu’il est « maître coq » ; elle est tombée sur un Belge !! qui lui indique la bonne voie à suivre.

    La semaine s’achève, elle boucle ses valises, c’est bientôt le retour à Paris, mais comme il a fini par lui parler, à mi-mot, de mariage, il lui offre un cadeau : une bague de fiançailles ? Un jonc en or ? Pensez-vous, un « capteur de rêves » qu’elle pourra accrocher au-dessus de son lit en pensant à lui. Et puis, la voilà dans un avion prêt à décoller, c’est alors qu’ il lui envoie un dernier sms : il lui demande…. sa recette pour faire cuire les œufs à la coque !!!

    Et puis, surprise, devinez qui vient occuper le siège à côté de notre héroïne ! Mais, oui ! Le Belge si aimable… et si c’était lui l’homme parfait ?


 

(1)  elle ne nous épargne, vraiment, aucun détail.

 

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Commentaires

 

Réglons d’abord un problème : pas plus qu’un Wallon ne sort un belgicisme toutes les 10 phrases pas plus un Québécois ne s’exprime en joual à tout bout de champ (je vous en ai épargné les 9/10e cités dans le livre).

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Venons en au récit : d’abord : la panoplie d’amants, cela pourrait être amusant si c’était raconté de manière très spirituelle et non comme l’énoncé d’un catalogue. Au Québec, à présent : inviter une « amie » pour une seule semaine, en plein hiver, par moins 20/moins 30, précisément la semaine où il a la garde de son fils, l’homme idéal n’est vraiment pas futé. La tête d’orignal dans le hall d’entrée : il faut le vouloir vu ses dimensions et puis, il n’y a de hall d’entrée ni dans les maisons ni dans les appartements : on pénètre directement dans la salle de séjour. Ensuite : il n’y a aucun Québécois qui laisserait sa maison sans un minimum de chauffage sous peine de voir tous ses tuyaux d’eau exploser, il suffit qu’il règle le thermostat en conséquence. Venons-en à la promenade en traîneau : deux clics sur Internet en montrent des photos : le siège étroit, très proche du sol, ne peut accueillir qu’une seule personne, mi-assise, mi-couchée, le guide se place en dehors, à l’arrière et, surtout, il ne tient pas de rênes, car les chiens obéissent à ses commandements. Enfin sortir sans vêtement par moins trente, c’est vouloir un suicide très douloureux et rapide, alors décrire une ballade en motoneige, sans aucun vêtement, relève de la plus pure affabulation.

 

Le roman veut-il jouer sur l’incompréhension, les méprises qu’occasionnent les mots et expressions en joual, veut-il faire « couleur locale » (en accumulant des erreurs) ??  On a connu Diane Ducret mieux inspirée. Enfin, le style quelconque, parfois vulgaire ne rachète rien. Etais-je le seul à avoir un avis aussi défavorable ? Par acquit de conscience, j’ai jeté un coup d’œil chez Babelio, l’œuvre n’y reçoit qu’une étoile sur cinq, le commentaire semble signifier que son auteur aurait mis moins si cela avait été possible.

 

Inutile de vous dire que je ne vous recommande pas ce roman.

 

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[Lis] Mary, Emily Barnett

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Bonjour, chers lecteurs! Je le reconnais: mon rythme de publication a connu des jours meilleurs… Néanmoins, me voici avec un nouvel article littéraire consacré à un roman de 2015 intitulé Mary. 

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Mary est une adolescente des années 2000, qui vit recluse avec sa mère dans un château. C’est aussi une jeune Américaine expatriée à Paris au début des années 50, mariée à un designer. Quels liens secrets entretiennent ces deux femmes ? Comment le Maccarthysme des années 50 peut-il contraindre mentalement une jeune fille d’aujourd’hui ?

De l’enfance sauvage aux atermoiements amoureux d’une femme dans le New York d’après-guerre, Mary sonde les thèmes de l’adultère, de la maternité et de la filiation.

Un premier roman à la forme soignée et maîtrisée qui emprunte à la Rebecca de Daphné du Maurier et aux romans de Laura Kasischke.

En dépit de la date de publication de cet ouvrage, c’est en bouquinerie que je l’ai découvert. Le résumé m’avait séduite par son évocation des années 1950 et de destins de femmes se répondant mystérieusement. La comparaison avec l’oeuvre de Daphné du Maurier avait indéniablement achevé de me convaincre… Et pourtant… Tout, dans cette quatrième de couverture, s’est avéré trompeur.

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Bien sûr, nous suivons effectivement deux Mary, mais si l’une évolue en 52 et 53, la seconde Mary n’est, elle, pas immédiatement située dans le temps. Rien ne la rattache à notre société actuelle et j’aurais aimé que l’on permette au lecteur de conserver ce doute même si, à bien y réfléchir, il viendrait s’ajouter à un récit déjà par trop sibyllin.

En effet, cette Mary contemporaine, manifestement frappée d’un désordre mental, sème des phrases obscures, entrecoupées de propos hallucinatoires et d’ellipses incessantes. Une galerie de personnages, que l’on ne nous présente jamais, crée, de surcroît, un climat inquiétant. L’écriture, dérangeante, frôle l’illisibilité et provoque un profond malaise chez le lecteur. J’ai failli définitivement refermer le roman.

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Ce qui m’a toutefois encouragée à poursuivre ma lecture, ce sont les chapitres prenant place dans le passé. Outre leur style rédactionnel significativement plus fluide, leur construction, basée sur une anticipation, a éveillé mon intérêt.

Les relations s’établissant entre les deux jeunes femmes, qui passent quelquefois pour des coïncidences, qui dressent, en d’autres occasions, des parallèles plus troublants, représentent l’autre atout de ce roman.

Mary n’est pas un mauvais livre, mais j’en garderai un souvenir mitigé… ainsi qu’une certaine rancœur à l’égard de l’éditeur, qui m’avait promis Rebecca et m’a laissée avec un ouvrage inégal, bien éloigné de mes attentes.

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