[Lis] Audrey retrouvée, Sophie Kinsella

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C’est toujours étrangement lorsque j’ai le moins de temps devant moi que le besoin d’écrire se fait le plus impérieux. Quand mon agenda se charge, la rédaction d’une simple chronique littéraire prend des allures de bouée de sauvetage spirituelle, alors qu’à l’approche d’un congé, le souhait de prendre la plume s’efface soudain devant mes envies d’évasion et de grand air.

Rapidement, toutefois, le retard considérable pris dans mes notes de lecture m’inspire un sentiment grandissant de culpabilité. J’ai fait de si jolies découvertes ces derniers jours qu’il me paraît inconcevable de ne pas vous en parler! Me voici donc de retour avec mon avis sur le premier roman jeunesse de la britannique Sophie Kinsella.

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Audrey a 14 ans. Elle souffre de troubles anxieux. Elle vit cachée derrière ses lunettes noires, recluse dans la maison de ses parents à Londres.
Ça, c’était avant.
Avant que Dr Sarah, son psychiatre, lui demande de tourner un film sur sa famille, pour voir la vie
d’un œil nouveau : celui de la caméra.
Avant que Linus, un copain de son frère, débarque. Avec son grand sourire et ses drôles de petits mots griffonnés sur le coin d’une feuille, il va pousser Audrey à sortir. Et à redécouvrir le monde…

Comme tant d’autres lecteurs, c’est avec L’accro du shopping que j’ai découvert Sophie Kinsella. Cette série, dont j’attends fébrilement le prochain volume, m’a réconciliée avec la lecture alors qu’étudiante, je m’épuisais les yeux devant mes interminables notes de cours. Sa pétillante narratrice, Becky Bloomwood, parvenait à me faire rire aux éclats, quel que soit mon degré de fatigue ou de nervosité.

L’univers grisant des galeries marchandes est cependant diamétralement opposé à celui dans lequel l’héroïne d’Audrey retrouvée évolue. Ou plutôt celui dans lequel elle s’enferme. Repliée sur elle-même au point de ne plus pouvoir affronter le monde extérieur, l’adolescente réduit son espace vital à une pièce de la maison et se dissimule en permanence derrière des lunettes de soleil afin d’échapper au regard des autres, même de ses proches.

Si son trouble trouve ses racines dans une situation de harcèlement scolaire sévère, les circonstances exactes n’en seront jamais éclaircies. L’essentiel n’est pas de raconter par le menu les sévices subis par Audrey, ni d’en pointer les responsables, mais bien de suivre, avec pudeur, le chemin parcouru jusqu’à la guérison.

L’auteur s’est inspirée de sa propre vie de famille pour imaginer les différents personnages qui gravitent autour de la jeune fille et la tendresse dont elle fait preuve à leur égard s’avère rapidement communicative. J’ai particulièrement apprécié la façon dont le couple parental est représenté: de prime abord, le lecteur croit retrouver le schéma classique de la mère névrosée et du père distant. Mais une fois qu’Audrey, sur les conseils de sa thérapeute, se met à filmer son quotidien, nous découvrons toute la complexité des relations au sein d’un foyer qui peine à se reconstruire.

Le personnage de Linus reste néanmoins le véritable rayon de soleil du roman. Positif, patient, présent, il semble toujours trouver les mots justes et ne craint pas de bouleverser les habitudes tristes et absurdes dans lesquelles Audrey s’est jusqu’alors réfugiée. La pertinence de ses réflexions et l’humour dont il fait preuve insufflent à l’adolescente l’espoir d’une vie heureuse. Ce fragile rétablissement est toutefois mis à l’épreuve lorsqu’Audrey se trouve contrainte d’affronter ce qu’elle a si longtemps fui. Sa volonté et la bienveillance de ceux qui l’entourent suffiront-elles à guérir un cœur si injustement meurtri?

En conclusion, si les thématiques de l’adolescence, de l’anxiété sociale et du harcèlement vous intéressent, je ne peux que vous recommander ce roman aussi sensible qu’optimiste!

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[Lis] L’homme parfait est québécois, Diane Ducret, par le Vert Lisant

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Une fois n’est pas coutume, ce soir, le Vert Lisant voit rouge… Découvrez pourquoi en lisant sa dernière critique!

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 Je m’étais replongé dans la littérature canadienne française quand ce livre est sorti de presse. Le titre promettait une lecture amusante, le quatrième de couverture assurait que la romancière revisitait le « mythe du Prince Charmant ». Prudent je consulte internet et je découvre, de suite, la critique élogieuse qu’un hebdomadaire réputé sérieux venait de publier : on y parle d’un livre spirituel, amusant, léger. Sur foi de quoi, j’achète et je commence à lire avec l’espoir de passer quelques moments agréables… Et puis, patatras, je tombe sur un florilège d’inepties rédigé dans un style où la forme ne rattrape pas le fond. Suivez-moi !!

 

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   L’héroïne de ce roman est célibataire bien qu’elle ait, à plusieurs reprises, essayé de ne plus l’être, ce qui nous vaut une panoplie d’hommes qui sont entrés dans son existence pour en sortir plus ou moins vite. La voilà qui pense entrer au couvent, et puis, quand même, non ! Enfin, heureux hasard, elle rencontre, à l’occasion d’une exposition de tableaux, le peintre en personne ; il est québécois, il est beau, charmant, séduisant. On noue une conversation, on la poursuit, plus tard dans un estaminet. Il lui avoue qu’il a des motons dans la gorge [fort peiné] car leur belle relation s’achève : il doit retourner au Québec le lendemain. Là-dessus, on se quitte, et, comme elle va prendre sa voiture, il lui demande si elle chauffe [conduit] depuis longtemps.

 

L’homme parfait s’exprime, aussi, en joual.

 

     Mais tout n’est pas perdu ! Rapidement, il lui demande de le rejoindre au Québec pour passer ensemble une semaine. Il l’attend à la porte de l’aéroport, l’habille et botte chaudement : on est en plein hiver et puis, en voiture pour découvrir sa maison, c’est-à-dire le cliché de « ma cabane au Canada » : faite en rondins avec, à l’arrière-plan : un lac, gelé certes, mais un lac quand même. On entre, elle admire, accrochée dans le hall d’entrée une tête d’orignal et découvre qu’il fait aussi froid à l’intérieur qu’à l’extérieur. On s’enveloppe de couvertures, dans le salon et puis au lit. Mais, ce sera chaste parce que (1) elle est dans une « mauvaise » semaine. Elle utilise les toilettes, mais la chasse est gelée (1), je vous passe les détails, mais elle s’en trouve terriblement gênée.  Bonne fille, elle prépare le petit déjeuner, demande à son hôte s’il a du bacon, celui-ci comprend [argent] et répond qu’il en a pas mal. Elle s’étonne parce que le frigo est vide.

    Enfin, chose promise, chose due : la promenade en traîneau. Les voilà assis, elle, son ami et le guide qui tient solidement les rênes, mais… les chiens puent et se soulagent en cours de route (1). Le peintre se saisit des rênes, ne peut éviter un cahot et la voila partie pour un vol plané qui se termine dans un tas de neige. Fini la balade romantique, d’autant plus que le Québécois doit aller chercher son fils : il est divorcé et c’est sa semaine de garde. On va faire des achats, l’enfant fait des niches dans le magasin, notre homme revient avec des paquets, demande si son fils n’a pas été tannant [insupportable], puis déclare qu’il va mettre les sacs dans la malle arrière de son char [le coffre de sa voiture]. Elle tout heureuse de voir qu’il n’y avait pas de blindé sur le parking.

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     Vient l’inévitable soirée avec les amis. Après leurs questions stupides à son sujet, viennent aussi et le repas et les libations ; le langage devient de moins en moins châtié, il emprunte de plus en plus au joual avec diverses expressions vulgaires ; notre héroïne, n’est pas en reste : « les gros mots sont, en France, comme des signes de ponctuation » (sic)

    La promenade « romantique » en traîneau s’étant mal terminée, pourquoi pas une balade en  »ski doo » [une marque de motoneige] et sans vêtements pour que ce soit plus amusant. Inévitablement, à mi-parcours, l’engin tombe en panne ; elle suggère d’appeler non pas un mécanicien (comme l’on s’y attendrait) mais un dépanneur [épicier], notre Québécois n’a pas le temps de s’étonner car sort du bois un orignal qui fait mine de charger. La motoneige consent à redémarrer et retour à la maison.

   Mais, le lendemain, il faut reconduire l’enfant chez sa mère. Comme notre peintre a de la fièvre, c’est notre héroïne qui le ramènera. Ce sera sans problème grâce au gps. La mère est avenante et plutôt gironde. Les deux femmes bavardent et, avant de se quitter, cette dernière confesse qu’elle avait peur qu’elle la trouve plate [stupide]. Sur le chemin de retour, le gps meurt, elle s’égare, échoue dans un village où elle demande son chemin à un homme. Mais c’est à « outsiplou », lui dit-il en ajoutant qu’il est « maître coq » ; elle est tombée sur un Belge !! qui lui indique la bonne voie à suivre.

    La semaine s’achève, elle boucle ses valises, c’est bientôt le retour à Paris, mais comme il a fini par lui parler, à mi-mot, de mariage, il lui offre un cadeau : une bague de fiançailles ? Un jonc en or ? Pensez-vous, un « capteur de rêves » qu’elle pourra accrocher au-dessus de son lit en pensant à lui. Et puis, la voilà dans un avion prêt à décoller, c’est alors qu’ il lui envoie un dernier sms : il lui demande…. sa recette pour faire cuire les œufs à la coque !!!

    Et puis, surprise, devinez qui vient occuper le siège à côté de notre héroïne ! Mais, oui ! Le Belge si aimable… et si c’était lui l’homme parfait ?


 

(1)  elle ne nous épargne, vraiment, aucun détail.

 

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Commentaires

 

Réglons d’abord un problème : pas plus qu’un Wallon ne sort un belgicisme toutes les 10 phrases pas plus un Québécois ne s’exprime en joual à tout bout de champ (je vous en ai épargné les 9/10e cités dans le livre).

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Venons en au récit : d’abord : la panoplie d’amants, cela pourrait être amusant si c’était raconté de manière très spirituelle et non comme l’énoncé d’un catalogue. Au Québec, à présent : inviter une « amie » pour une seule semaine, en plein hiver, par moins 20/moins 30, précisément la semaine où il a la garde de son fils, l’homme idéal n’est vraiment pas futé. La tête d’orignal dans le hall d’entrée : il faut le vouloir vu ses dimensions et puis, il n’y a de hall d’entrée ni dans les maisons ni dans les appartements : on pénètre directement dans la salle de séjour. Ensuite : il n’y a aucun Québécois qui laisserait sa maison sans un minimum de chauffage sous peine de voir tous ses tuyaux d’eau exploser, il suffit qu’il règle le thermostat en conséquence. Venons-en à la promenade en traîneau : deux clics sur Internet en montrent des photos : le siège étroit, très proche du sol, ne peut accueillir qu’une seule personne, mi-assise, mi-couchée, le guide se place en dehors, à l’arrière et, surtout, il ne tient pas de rênes, car les chiens obéissent à ses commandements. Enfin sortir sans vêtement par moins trente, c’est vouloir un suicide très douloureux et rapide, alors décrire une ballade en motoneige, sans aucun vêtement, relève de la plus pure affabulation.

 

Le roman veut-il jouer sur l’incompréhension, les méprises qu’occasionnent les mots et expressions en joual, veut-il faire « couleur locale » (en accumulant des erreurs) ??  On a connu Diane Ducret mieux inspirée. Enfin, le style quelconque, parfois vulgaire ne rachète rien. Etais-je le seul à avoir un avis aussi défavorable ? Par acquit de conscience, j’ai jeté un coup d’œil chez Babelio, l’œuvre n’y reçoit qu’une étoile sur cinq, le commentaire semble signifier que son auteur aurait mis moins si cela avait été possible.

 

Inutile de vous dire que je ne vous recommande pas ce roman.

 

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[Lis] La bibliothèque des coeurs cabossés, Katarina Bivald

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Par cette froide soirée de janvier, je suis heureuse de vous faire part de mes impressions de lecture sur La bibliothèque des cœurs cabossés, un ouvrage qui m’avait été chaudement recommandé dès sa sortie, il y a très exactement un an. Est-il à la hauteur de l’enthousiasme qu’il a provoqué chez de nombreux lecteurs ?

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Tout commence par les lettres que s’envoient deux femmes très différentes : Sara Lindqvist, vingt-huit ans, petit rat de bibliothèque mal dans sa peau, vivant en Suède, et Amy Harris, soixante-cinq ans, cultivée et solitaire, de Broken Wheel, dans l’Iowa.

Après deux ans d’échanges portant tout autant sur la littérature que sur la vie, Sara prend la décision de rendre visite à son amie. Mais, à son arrivée, les surprises s’enchaînent…

En guise de préambule, je me dois de vous mettre en garde contre la quatrième de couverture : surtout, si vous le pouvez encore, évitez-la à tout prix ! Ne lui accordez pas un regard, vous le regretteriez : elle dévoile impunément les grandes lignes de l’intrigue sur près de 300 pages ! Suis-je la seule à trouver ce procédé éditorial proprement scandaleux ? Fort heureusement pour moi, puisque l’exemplaire m’avait été prêté, je me suis plongée sans attendre dans sa lecture et je m’en félicite !

Comme je l’ai peut-être déjà évoqué précédemment, en cette période glaciale et morose, j’évite tout ouvrage sombre ou tortueux pour me ruer sur les romans feel-good qui, à défaut d’être intensément stimulant sur le plan intellectuel, ont l’avantage de me garantir un moment de douceur et d’apaisement. La bibliothèque des cœurs cabossés appartient immanquablement à cette catégorie littéraire.

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Hormis les fables déjantées du finlandais Arto Paasilinna, il doit s’agir de l’un des premiers titres scandinaves à me tomber entre les mains et si cette particularité éveillait ma curiosité, je dois admettre qu’à la lecture, elle se fait rapidement oublier.

Le style de l’auteur, tout en étant plaisant, n’a rien de véritablement exotique et respecte à la lettre les codes du genre. Quant à l’intrigue, à défaut de nous faire découvrir les paysages de la Suède, elle nous immerge au beau milieu des Etats-Unis, dans la bourgade oubliée de Broken Wheel!

Quel étrange décor, quel charme étonnant que celui de cette malheureuse ville fantôme du Midwest profond. Désertée par ses habitants, toujours plus attirés par les opportunités qu’offre la métropole, elle vivote grâce à quelques irréductibles, dont notre héroïne fait rapidement la connaissance.

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L’absence de perspectives professionnelles, la disparition des écoles et des commerces semble, de prime abord, avoir endurci le cœur des habitants. Très vite, toutefois, ils se révèlent à nous et, tout comme Sara, nous finissons par nous attacher à ces personnages que la vie n’a pas épargnés.

Véhiculée, nourrie, logée, la jeune Suédoise ne cesse de s’étonner de la générosité de ses nouveaux voisins et se sent rapidement redevable à leur égard. Alors qu’ils refusent toute aide de sa part, de quelle façon peut-elle les remercier de leur incomparable accueil ?

Sara, qui a quitté un emploi de libraire, n’entrevoit qu’une seule solution : pourquoi ne pas leur offrir des romans ? La suggestion, insensée aux yeux des habitants, n’emporte pas immédiatement l’adhésion, mais notre avide lectrice déploiera des trésors d’ingéniosité pour tenter de faire découvrir, même aux plus réfractaires, le pouvoir d’un livre bien choisi.

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Ajoutez à cette jolie promesse une multitude de références littéraires, un brin de roman épistolaire ainsi qu’un soupçon de romance, et vous obtiendrez une lecture agréablement réconfortante et idéale en cette saison !

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[Lis] Le vol des aigrettes, Sue Monk Kidd

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Bonsoir à tous! Cela fait déjà deux bonnes semaines que j’ai terminé ce joli roman… et, si l’on prend en considération ma modeste mémoire, il devient désormais urgent de vous en toucher quelques mots ici! Ne perdons pas un seul instant: place à la quatrième de couverture!

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A une époque de ma vie où j’étais avant tout l’épouse de Hugh et la mère de Dee, l’une de ces femmes pas ambiguës pour deux sous, n’ayant aucune envie de troubler l’ordre du monde, je suis tombée amoureuse d’un moine bénédictin…

Ainsi commence l’histoire de Jessie, qui voit sa vie bouleversée à quarante-deux ans, en retournant sur l’île de son enfance, au large de la Caroline du Sud.

Après Le Secret des abeilles, son incroyable best-seller qui s’est vendu à plus de cinq millions d’exemplaires aux États-Unis, Sue Monk Kidd décrit dans ce beau roman les désirs d’une femme qui doute, nous révélant ainsi le véritable sens de l’amour, la tentation du risque, et le pouvoir du pardon.

Ce qui m’a donné envie de découvrir ce titre, ce n’est d’abord pas son résumé – pourtant attirant -, ni même sa très jolie illustration de couverture, mais bien son auteur. Paradoxalement, je n’avais encore rien lu de Sue Monk Kidd, mais je gardais un souvenir émerveillé de l’adaptation cinématographique de son best-seller, Le secret des abeilles.

Tomber par hasard sur ce roman me donnait dès lors l’occasion de rattraper le temps perdu! C’est donc à peine si je l’ai feuilleté avant de me décider à l’emporter. Bien souvent, ce genre d’achat impulsif se solde par une déception… Cette fois, c’est fort heureusement l’inverse qui s’est produit!

Ma première agréable surprise fut de découvrir que le titre original – The Mermaid Chair – évoquait l’une de mes créatures mythiques favorites, la sirène. En étant plus attentive, je me serais aperçue que la couverture y faisait déjà allusion. En effet, le personnage de la sirène et son élément naturel, l’eau, servent en quelque sorte de fil rouge au récit que nous raconte Jessie, sur le ton de la confidence.

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Lorsque débute le roman, notre héroïne se trouve prise au piège d’une existence monotone, qu’elle a le sentiment de ne pas avoir réellement choisie. Sous des dehors de vie de famille idéale, la soif de nouveaux horizons qui l’étreint se fait ressentir de manière de plus en plus pressante.

Une première prise de conscience survient avec le départ de sa fille unique pour l’université… mais c’est lorsqu’elle reçoit d’inquiétantes nouvelles de sa mère, Nelle, que Jessie décide véritablement de prendre, seule, son envol et de rejoindre sa terre natale.

Nous embarquons avec elle sur un ferry en direction de l’Île aux Aigrettes, un lieu hors du temps où les habitants, appelés les « binyas », se déplacent en voiturette de golf. Nous y faisons la connaissance de personnages attachants, comme Kat, amie fidèle de Nelle et mère de Benne, seule insulaire capable de communiquer avec son éternelle mascotte, un labrador noir qui accueille joyeusement les touristes à l’embarcadère.

C’est dans ce paysage idyllique, où se mêlent folklore local et croyances anciennes, qu’un lourd secret de famille refait surface. Jessie devra lever le voile sur ce mystère pour guérir des blessures du passé et, enfin, se reconstruire. Sa rencontre avec le Frère Thomas, intrigué lui aussi par cette énigme mystique et par l’histoire de la sirène Asénora devenue sainte patronne des lieux, la mettra sur la voie…

J’ai été charmée par cet ouvrage, que j’ai lu en seulement quelques jours. Sue Monk Kidd nous dépeint avec nuance le parcours d’une femme qui aurait tout pour être heureuse, mais qui souffre du manque de réponses aux questions qui la hantent depuis l’enfance.

J’y ai retrouvé un esprit proche des romans de Fannie Flagg, caractérisés par une légèreté apparente qui masque des questions identitaires et relationnelles plus profondes. Le vol des Aigrettes  a été adapté en téléfilm sous le titre de La légende de Sérenna… Si j’ai l’opportunité de le regarder, je vous ferai immanquablement part de mes impressions!

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[Lis] Mary, Emily Barnett

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Bonjour, chers lecteurs! Je le reconnais: mon rythme de publication a connu des jours meilleurs… Néanmoins, me voici avec un nouvel article littéraire consacré à un roman de 2015 intitulé Mary. 

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Mary est une adolescente des années 2000, qui vit recluse avec sa mère dans un château. C’est aussi une jeune Américaine expatriée à Paris au début des années 50, mariée à un designer. Quels liens secrets entretiennent ces deux femmes ? Comment le Maccarthysme des années 50 peut-il contraindre mentalement une jeune fille d’aujourd’hui ?

De l’enfance sauvage aux atermoiements amoureux d’une femme dans le New York d’après-guerre, Mary sonde les thèmes de l’adultère, de la maternité et de la filiation.

Un premier roman à la forme soignée et maîtrisée qui emprunte à la Rebecca de Daphné du Maurier et aux romans de Laura Kasischke.

En dépit de la date de publication de cet ouvrage, c’est en bouquinerie que je l’ai découvert. Le résumé m’avait séduite par son évocation des années 1950 et de destins de femmes se répondant mystérieusement. La comparaison avec l’oeuvre de Daphné du Maurier avait indéniablement achevé de me convaincre… Et pourtant… Tout, dans cette quatrième de couverture, s’est avéré trompeur.

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Bien sûr, nous suivons effectivement deux Mary, mais si l’une évolue en 52 et 53, la seconde Mary n’est, elle, pas immédiatement située dans le temps. Rien ne la rattache à notre société actuelle et j’aurais aimé que l’on permette au lecteur de conserver ce doute même si, à bien y réfléchir, il viendrait s’ajouter à un récit déjà par trop sibyllin.

En effet, cette Mary contemporaine, manifestement frappée d’un désordre mental, sème des phrases obscures, entrecoupées de propos hallucinatoires et d’ellipses incessantes. Une galerie de personnages, que l’on ne nous présente jamais, crée, de surcroît, un climat inquiétant. L’écriture, dérangeante, frôle l’illisibilité et provoque un profond malaise chez le lecteur. J’ai failli définitivement refermer le roman.

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Ce qui m’a toutefois encouragée à poursuivre ma lecture, ce sont les chapitres prenant place dans le passé. Outre leur style rédactionnel significativement plus fluide, leur construction, basée sur une anticipation, a éveillé mon intérêt.

Les relations s’établissant entre les deux jeunes femmes, qui passent quelquefois pour des coïncidences, qui dressent, en d’autres occasions, des parallèles plus troublants, représentent l’autre atout de ce roman.

Mary n’est pas un mauvais livre, mais j’en garderai un souvenir mitigé… ainsi qu’une certaine rancœur à l’égard de l’éditeur, qui m’avait promis Rebecca et m’a laissée avec un ouvrage inégal, bien éloigné de mes attentes.

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[Lis] Un roman anglais, Stéphanie Hochet

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Bonsoir à tous! J’ai mis mes quelques jours de congé à profit pour lire davantage que d’ordinaire et je suis donc particulièrement heureuse de pouvoir vous proposer des articles littéraires aussi rapprochés. Celui-ci sera consacré à un titre paru au printemps dernier: il s’agit d’Un roman anglais, de Stéphanie Hochet.

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Inspiré de la vie de Virginia Woolf, ce roman campe avec beaucoup de subtilité et de maîtrise l’atmosphère très particulière qui régnait en Angleterre pendant la Première Guerre mondiale.

Ce roman d’émancipation féminine est aussi un roman sur la maternité. On y voit Anna, bourgeoise lettrée du Sussex, mère d’un petit garçon de deux ans, Jack, persuader son mari Edward d’embaucher par petite annonce une garde d’enfant prénommée George (comme George Eliot, pense-t-elle).

Le jour où elle va chercher George à la gare, Anna découvre toutefois qu’il s’agit d’un homme.

Dès les premières lignes, j’ai été charmée par ce roman, dont la sobriété étudiée retranscrit sans emphase les sentiments d’une narratrice en proie au doute. Anna éprouve en effet des difficultés à se situer en tant que femme. Ainsi, la question du droit de vote, en particulier, lui pose question et il est difficile d’établir si l’attitude des suffragettes la fascine ou la consterne.

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C’est également en tant qu’épouse et en tant que mère qu’elle ignore comment se comporter : si elle déborde d’amour pour son fils, elle ne peut dissimuler son étonnement face au prétendu bonheur inconditionnel que la maternité était supposé lui apporter.

Prise entre deux époques, entre guerre et paix, puis entre deux guerres, Anna est l’archétype de la femme déchirée, qui ne peut s’inspirer de son expérience familiale pour savoir comment agir. Elle ne garde qu’un souvenir brumeux d’une mère inconsistante, partie trop tôt, et demeure marquée par une relation ambiguë avec son père, être autoritaire dont la violence semble être restée contenue.

Anna se retrouve dès lors perdue, dans une société qui improvise sa reconstruction et paraît soudain exiger d’elle qu’elle mène une carrière ambitieuse, soit une mère exemplaire et agisse en citoyenne engagée. Son combat intérieur entre en résonance avec l’évocation de ceux qui éclatent dans les tranchées et privent les familles de leurs membres les plus jeunes, les plus sains.

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Pourtant, de prime abord, les apparences la dépeignent comme menant une vie bourgeoise, résolument conforme aux convenances de la société anglaise. C’est l’arrivée, foncièrement inconvenante, d’une gardienne d’enfant de sexe masculin qui chamboule son existence et la fait sortir de ses rails. Ce moment opère un basculement irréversible, qui modifiera la dynamique familiale de manière indélébile.

George, jeune homme délicat, presque éthéré, rétablit toutefois une forme d’équilibre grâce à sa personnalité altruiste, miraculeusement apaisante. Seul Edward, personnage obscur, rongé par l’orgueil et une envie mal placée, reste insensible à son caractère bienfaisant.

Aux yeux d’Anna, cependant, George incarne l’unique repère, dont son bien-être, voire sa santé mentale, dépendent désormais. Au moindre accident de parcours, elle semble prête à verser dans un absolu désespoir.

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Stéphanie Hochet parsème son roman de multiples références littéraires, démontrant l’érudition de sa narratrice qui a grandi dans la bibliothèque paternelle et éveillant notre envie de découvrir à notre tour les auteurs évoqués. J’ai particulièrement apprécié l’insertion d’un poème, en version originale, d’Emily Dickinson. Des expressions en langue anglaise émaillent, par ailleurs, le texte et l’enrichissent par leurs sonorités étrangères.

La plume de l’auteur témoigne d’une langue belle et précise, dont la modernité est aussi riche que limpide. J’ai lu ce bref roman en un seul souffle, tant j’ai été séduite par son écriture et touchée par le parcours de vie d’une héroïne qui n’est pas sans rappeler un écrivain que j’apprécie particulièrement, Virginia Woolf.

Je ne peux que vous recommander d’ouvrir sans tarder Un roman anglais. Quant à moi, j’inscris tous les ouvrages de Stéphanie Hochet sur ma liste de souhaits!

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[Lis] Le cirque des rêves, Erin Morgenstern

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Bonsoir, chers lecteurs! Aujourd’hui, j’ai le plaisir de partager avec vous une note de lecture consacrée à un roman vraiment unique: Le cirque des rêves, d’Erin Morgenstern.

Pour ne rien vous cacher, je l’avais acheté dès sa sortie, il y a trois ans, tant j’avais été séduite par l’originalité de sa mise en page: en effet, un livre à la tranche rouge ne manque pas de se faire remarquer en librairie!

Étrangement, je l’ai ensuite quelque peu perdu de vue, et c’est en partant à la recherche de lectures idéales pour la saison qu’il s’est de nouveau imposé à moi. Cette fois fut la bonne, puisque j’ai enfin passé la grille d’entrée de ce cirque riche en mystères!

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« Le cirque arrive sans crier gare. Aucune annonce ne précède sa venue, aucune affiche sur les réverbères, aucune publicité dans les journaux. Il est simplement là, alors qu’hier il ne l’était pas. »

Sous les chapiteaux rayés de noir et de blanc, c’est une expérience unique, une fête pour les sens où chaque visiteur peut se perdre avec délice dans un dédale de nuages, flâner dans un luxuriant jardin de glace, s’émerveiller de la souplesse de la contorsionniste tatouée et se laisser enivrer par les effluves de caramel et de cannelle qui flottent dans l’air. Bienvenue au Cirque des Rêves.

Cependant, derrière la fumée et les miroirs, la compétition fait rage. Deux jeunes illusionnistes, Celia et Marco, s’affrontent, rivalisant d’audace et d’imagination, dans une sorte de combat magique, pour lequel ils sont entraînés depuis l’enfance par leurs étranges et lunatiques professeurs…

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Comme je vous l’écrivais, ce roman, sans être difficile à appréhender, se révèle tout à fait particulier. Plusieurs éléments sont de nature à décontenancer le lecteur.

En premier lieu, le style rédactionnel manifeste, à l’image du cirque dont il est question, un infini soin du détail. L’auteur maîtrise l’art de la description, avec une précision d’horloger et le souci esthétique d’un véritable orfèvre, ce qui, additionné à une intrigue extrêmement immersive, peut nécessiter un temps d’adaptation certain.

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Ensuite, la construction non linéaire nous fait opérer des voyages chronologiques, dont des retours dans un passé parfois étonnamment proche. Des propos prophétiques et des visions obscures de l’avenir viennent encore complexifier le fil narratif. Si cela peut être déstabilisant, ce choix de l’auteur réussit à entraîner une réelle envie de tourner les pages, afin que les divers embranchements de l’histoire se rejoignent enfin.

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En outre, comme la quatrième de couverture le laisse présager, le cirque dans lequel évoluent les personnages est autant le produit de l’imagination d’un ingénieur brillant et d’artisans de génie qu’il n’est le résultat d’une magie hautement sophistiquée. Je devrais plutôt écrire le dernier terme au pluriel car, sous les chapiteaux, deux écoles de charmes se côtoient, s’affrontent et se défient.

Celia et Marco sont les protagonistes de cette compétition de haut vol, dont les règles ne sont jamais clairement énoncées. Chacun se surpasse pour impressionner son concurrent, ce qui donne lieu à de véritables prouesses qui éblouissent les visiteurs, bien qu’ils n’en saisissent pas la nature.

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Certains, tombés sous le charme des lieux, forment une communauté d’admirateurs qui tente de suivre le cirque dans ses moindres déplacements. La tâche n’est pas aisée, car sa tournée est tenue secrète, mais un réseau se tisse à l’échelle internationale et les nouvelles vont vite. Difficile, à l’issue de cette lecture, de ne pas ressentir à son tour l’envie de rejoindre ceux qui ont opté pour le surnom poétique de « Rêveurs ».

Je choisis de m’en tenir là, afin de laisser intacte votre découverte du Cirque des Rêves, dont je ne peux que vous recommander la lecture!

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[Lis] Conversion, Katherine Howe

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Bonjour à tous! Je suis de retour aujourd’hui avec une note de lecture consacrée au roman qui m’a accompagnée jusqu’à Halloween: il s’agit de Conversion, de Katherine Howe.

J’aurais aimé poster mon article le jour J, mais les préparatifs de notre grande soirée déguisée ont pris le pas sur toute autre activité! Je prends donc le parti de publier cet avis a posteriori, ce qui me permet de prolonger l’atmosphère de cette fin de mois d’octobre que j’apprécie tant.

 

Colleen, Deena, Emma et Anjali sont en terminale dans le prestigieux lycée St Joan. Comme ses camarades, Colleen est obsédée par les procédures d’admission des plus grandes universités du pays. Un jour de janvier, une de ses camarades est prise de convulsions et se trouve rapidement suivie d’autres élèves présentant des symptômes aussi étranges. Alors que la presse s’empare de l’affaire, un vent de panique souffle sur St Joan.

Mais pas question pour Colleen de se laisser déstabiliser : elle doit travailler sur la pièce Les Sorcières de Salem, d’Arthur Miller. Et ses recherches la mènent en 1692, au moment du procès des sorcières, à la rencontre d’Ann Putman qui fit semblant d’être ensorcelée.

Les époques se croisent, les drames se nouent. Qu’arrive-t-il aux élèves de St Joan ? Et si la réponse se trouvait dans le passé, trois siècles plus tôt ?

Comme vous le savez peut-être déjà, j’ai un faible pour les personnages de sorcières, contemporaines ou historiques. Ce roman, qui est une fiction inspirée à la fois d’événements de 2012 et des célèbres procès du XVIIe siècle, semblait donc tout indiqué pour la lectrice que je suis. Et pourtant, il n’est finalement que peu question de sorcellerie, que cela soit dans les chapitres principaux ou dans les interludes consacrés au passé.

En effet, Conversion se centre avant tout sur des faits réels et récents qui ont frappé un lycée de l’état de New-York: de manière subite et simultanée, une vingtaine de personnes (principalement des étudiantes) ont été frappées de manifestations médicales diverses et inexpliquées. Ce phénomène a été baptisé par la presse la « maladie mystère ».

Katherine Howe s’est emparée de ce fait divers qui a défrayé la chronique, en choisissant de l’aborder selon le point de vue d’une camarade de classe de la première victime. Et si les protagonistes forment une bande de copines âgées d’à peine 17 ans, le moins que l’on puisse dire est que l’insouciance ne les caractérise en rien.

Les jeunes filles sont en réalité constamment soumises à des pressions, qu’elles soient scolaires ou parentales, qu’elles résident dans le regard des autres ou dans leur propre acceptation d’elles-mêmes. Alors qu’elles ne sont pas encore majeures, elles subissent un niveau de stress insoupçonné et pourtant symptomatique de notre époque, son rythme haletant et son esprit de compétition omniprésent.

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Cette atmosphère pesante est-elle responsable du mal qui les frappe une à une? La cause est-elle, au contraire, liée à un facteur environnemental? A moins que la genèse du phénomène ne soit de nature paranormale?

Le récit fait alterner le temps présent avec le début des années 1800 où Ann, témoin des procès de Salem, revient sur ses déclarations et lève le voile sur les circonstances qui ont incité les jeunes filles à accuser leurs voisines de sorcellerie. J’ai apprécié l’ancrage historique de ces chapitres, qui offrent un éclairage intéressant sur cette saga juridique toujours auréolée de mystère.

Si ces interludes ont, malheureusement, entraîné quelques longueurs, ils restent, selon moi, les passages les mieux rédigés du roman. J’ai, effectivement, moins apprécié le style des chapitres narrés par Colleen. Durant les premières pages, le ton teenager dont se pare la plume de l’auteur m’a paru artificiel et presque agaçant, mais je dois bien reconnaître que, l’intrigue aidant, je n’y ai rapidement plus prêté attention.

Dans l’ensemble, j’ai beaucoup apprécié cette lecture. Si je n’y ai pas retrouvé autant de magie que je l’aurais souhaité, j’ai néanmoins été captivée par l’énigme médicale présentée, comme par la nouvelle interprétation des événements de Salem que Katherine Howe nous propose.

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[Lis] Comment se dire adieu, Laurie Colwin

Bonsoir à tous!  C’est avec un peu de retard que je vous propose ce soir une nouvelle note de lecture, consacrée à un roman trouvé par hasard en bouquinerie: Comment se dire adieu?, de Laurie Colwin.

A vingt ans et quelque, Geraldine Coleshares, plaque sa thèse sur Jane Austen ou la guerre des sexes, pour être la première danseuse blanche du plus grand groupe rythm and blues de tous les temps : Ruby Tremblay & les Tremblettes.

Difficile, dix ans plus tard, de répondre aux questions des amis très chics de son mari avocat, même quand on a travaillé (un peu), fait un bébé (génial), trouvé un amant (juste un soir). Car Geraldine, elle, hésite encore : diva pop noire ou juive d’Europe centrale d’avant l’Holocauste, ça lui plairait bien.  

 

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Comme je vous l’écrivais à l’instant, je ne connaissais rien de cet ouvrage, ni de son auteur, mais je me suis sentie attirée par la jolie couverture et par la promesse d’un personnage un peu perdu face à l’âge adulte et les attentes sociales qui y sont bien souvent associées.

Ma première impression fut la bonne: c’est exactement le point focal du roman, qui repose presque entièrement sur les épaules de sa narratrice. Ce parti pris se révèle à double-tranchant, car Geraldine, avec ses hésitations continuelles et ses questionnements existentiels, risque de susciter des sentiments assez tranchés chez le lecteur. Heureusement, pour ma part, le charme a opéré et je me suis prise d’affection pour cette jeune femme en quête de sens.

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Si vous vous attendez à une plongée dans l’univers musical des seventies, vous risquez fort d’être déçus. En effet, bien que des références, des souvenirs et des anecdotes émaillent le roman, seuls les premiers chapitres sont véritablement consacrés à la vie de choriste de Geraldine – et ils sont narrés a posteriori. Le récit se centre plutôt sur son existence après la tournée et sur sa difficulté à retrouver un mode de vie plus conventionnel.

Car, alors que la plupart des tremblettes envisagent leur participation au groupe comme un emploi éphémère, qu’elles quittent d’elles-mêmes pour poursuivre leurs véritables aspirations, notre narratrice considère, au contraire, sa brève carrière musicale comme ses meilleures années et a bien du mal à rebondir, une fois évincée de la scène.

Geraldine ne sait, en vérité, absolument pas ce qu’elle veut faire de sa vie. Elle n’a pas de réelles ambitions professionnelles, ni de forte envie de fonder une famille. Habituée, depuis l’enfance, à décevoir sa mère, elle ne semble trouver un sens à ses actes que dans un certain mépris des conventions. Certes, elle se marie, mais la cérémonie se déroule dans le secret le plus total, et quand elle prend un emploi, c’est dans un quartier réputé dangereux, que sa famille désapprouve.

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De toute façon, notre héroïne a bien compris qu’il est impossible de satisfaire tout le monde. Ce constat se cristallise au moment de la naissance de son fils, qui entraîne un flot ininterrompu de conseils contradictoires et de jugements à peine voilés.

Heureusement, Geraldine peut alors compter sur une autre maman rebelle, Ann, dont la mèche verte et la surconsommation de caféine attirent instantanément la narratrice. Leurs réunions, souvent clandestines, ont constitué mes passages favoris de tout le roman. Leur regard lucide et hautement sarcastique sur la maternité et sur le monde qui les entoure m’a beaucoup amusée.

En conclusion, Comment se dire adieu? est une jolie découverte et une agréable surprise, qui me donne envie de mettre la main sur d’autres titres de cet auteur!

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[Lis] La meilleure d’entre nous, Sarah Vaughan

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Bonsoir, amis lecteurs! C’est enfin le weekend et j’en ai profité pour parachever une note de lecture consacrée à un roman qui m’avait été chaudement recommandé, La meilleure d’entre nous.

 

« N’oubliez pas : la pâtisserie est une preuve d’amour. » Kathleen Eaden, L’Art de la pâtisserie, 1966.

Angleterre, de nos jours. Le concours pour élire la nouvelle Kathleen Eaden a commencé ! Cinq candidats sont en lice, réunis par une passion commune. Mais la confection d’un cheesecake ou d’un paris-brest ne suffit pas toujours à faire oublier les blessures et les peines.

Jenny, la cinquantaine tout en rondeurs, délaissée par son mari ; Vicki, qui aspire à plus qu’à élever son petit Alfie ; Claire, la jeune caissière mère célibataire qui ne rêve même plus d’une autre vie ; Karen, dont l’apparente perfection dissimule bien des secrets ; sans oublier Mike, veuf en pleine thérapie culinaire… Au cours d’une compétition aussi gourmande qu’échevelée, tous apprendront que l’art de la vie est au moins aussi difficile que celui de la pâtisserie.

 

Alors que je m’apprête à vous faire part de mon avis sur cette découverte récente, je me sens encore hésitante: si j’ai sincèrement apprécié ce roman, je demeure insatisfaite sur certains points.

 

En premier lieu, le style de Sarah Vaughan m’a déstabilisée. J’admets avoir été charmée par les extraits de L’Art de la pâtisserie qui introduisent les différents chapitres. Je les ai trouvés subtilement intégrés et richement significatifs, mais j’ai avant tout apprécié leur écriture délicate et joliment désuète, qui laisse croire en leur authenticité.

En poursuivant ma lecture, j’ai rapidement regretté de ne pas retrouver ailleurs dans le roman ce sens de la formulation soignée et de l’image bien choisie. Le ton, qui se veut généralement plus neutre, présente néanmoins une fluidité agréable, même si certaines tournures de phrases étrangement maniérées m’ont fait hausser un sourcil.

 

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Les personnages, quant à eux, sont indéniablement attachants: aucun ne semble avoir été épargné par la vie et ils chargent dès lors ce concours d’enjeux personnels de la plus haute importance. Nous les découvrons, au fil des pages, alors que les tourtes au saumon, les sablés au citron et les brioches au safran leur permettent de se révéler et de faire le bilan de leurs existences, bien souvent dans l’impasse.

Je déplore toutefois le survol manifeste de certains candidats au profit d’autres. C’est plus précisément le cas de Mike, seul homme derrière les fourneaux, auquel Sarah Vaughan accorde selon moi trop peu de son attention. De plus, l’auteur ne parvient pas à éviter certains stéréotypes et les intrigues s’avèrent malheureusement quelquefois prévisibles. La compétition permet alors de rythmer le roman et de lui apporter un soupçon bienvenu de surprise.

 

Pourtant, en dépit de ces défauts, j’ai passé un agréable moment de lecture. L’évocation réussie de toutes ces pâtisseries m’a mis l’eau à la bouche, je me suis prise au jeu du concours et me suis même surprise à soutenir mon participant favori!

En conclusion, si vous recherchez un roman léger comme une meringue italienne et réconfortant comme un soufflé au chocolat, ce livre est sans nul doute fait pour vous!

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